Gary Payton – The Glove
« Probablement l’arrière le plus complet qu’il n’y a jamais eu. » Quand il faut parler de Gary Payton, le Hall of Famer et ancien arrière des Lakers Gail Goodrich n’est pas hésitant. Devenu The Glove (le gant) pour son habileté défensive, il était aussi un attaquant performant et un excellent passeur. Gary Payton, oui, un meneur complet.
Meneur dominant
Natif d’Oakland, en Californie, il évolue au lycée avec Greg Foster, futur pivot NBA, un peu frustre mais 13 saisons dans la ligue tout de même. Il continue sa formation à Oregon State. Après une saison freshman encourageante (12.5ppg-7.6apg-4rpg), il est suspendu à cause de notes en chute libre. Une soufflante paternelle plus tard, ses résultats remontent et il peut à nouveau briller sur les parquets.
Au cours de son cursus, il représente aussi le maillot américain lors du Mondial U19 ’87 et du FIBA Americas Championship ’89, 2 compétitions où il échoue en finale. Chez les Beavers, il remporte divers awards intra-conférence et fait consensus dans les NCAA All-American First Team lors de son année senior. À sa sortie d’Oregon State, il détient les records de points, tirs, tirs à 3-points, assists et steals — seul ce dernier record tient encore. Il est, depuis 1996, intronisé dans l’OSU’s Sports Hall of Fame.
Après 4 ans à Oregon State, il est éligible à la draft 1990. Le niveau général est relativement faible (6 All-Stars), Gary Payton est retenu en deuxième position par les Seattle SuperSonics derrière Derrick Coleman (Nets). La jeune vedette, qui a fait la couverture de Sports Illustrated en mars 1990, connait une adaptation délicate et ne passe pas les 10 points par match lors de ses deux premières saisons. Avec plus de 6 passes par match, il reste tout de même titulaire, épaulé par Sedale Threatt et Nate McMillan.
The Glove, surnom donné par son cousin
Durant son année sophomore, George Karl remplace KC Jones sur le banc et axe davantage le jeu sur la relation Payton – Kemp. Le Sonic Boom met le feu à la league. Le alley-oop devient une arme dévastatrice grâce à la vision du jeu de Gary Payton et à la puissance de Shawn Kemp. Mais le collectif des Sonics ne se résume pas à ce tandem d’équilibristes. George Karl s’appuie également sur Ricky Pierce, Eddie Johnson, Derrick McKey, Sam Perkins, Nate McMillan, Dana Barros et Michael Cage.
Ainsi, en 1993, Gary Payton monte à 13.5 points par match, les Sonics ont la 5e attaque et la 5e défense et remportent 55 matchs. La progression est stoppée par les Suns, en finale de conférence, dans une série en 7 matchs où il gagne son surnom du Glove par son cousin pour sa défense sur Kevin Johnson.
Kevin Johnson : Vous voyez des gars avec de bonnes mains, comme Maurice Cheeks et Derek Harper. Gary est comme eux. Mais il est aussi un excellent défenseur sur l’homme et un excellent défenseur d’équipe. Il a ces trois qualités. C’est très rare.
Les Sonics recrutent alors Detlef Schrempf et la machine à steals Kendall Gill; ils deviennent un favori au titre. Le tandem Kemp (18.1ppg-10.8rpg) – Payton (16.5ppg-6apg) a définitivement pris le pouvoir et l’équipe remporte 63 matchs en 1994, un record de franchise. Mais en playoffs, les SuperSonics tombent face aux Nuggets de Dikembe Mutombo dès le premier tour (3-2).
Lors de cette saison, Gary Payton devient un joueur qui compte en NBA. Retenu pour le All-Star Game et dans la All-NBA Third Team, sa carrière est lancée. Néanmoins, collectivement, les belles saisons régulières ne donnent pas de résultat en playoffs. En 1995, malgré l’avantage du terrain, les Sonics sont encore éliminés au premier tour, face à un Nick Van Exel survolté.
Gary Payton face à Michael Jordan
À l’été 95, le défenseur Kendall Gill est envoyé aux Hornets pour le shooteur Hersey Hawkins. Le move est payant. Gary Payton pique 2.9 ballons par match et remporte le trophée de défenseur de l’année. Il mène les Sonics à 64 victoires, nouveau record — définitif — de franchise. Ils passent le premier tour (Kings, 3-1), sweepent les Rockets, double champion en titre, puis éliminent le Jazz en 7 matchs.
Face aux Bulls et leur année record (72-10 en saison régulière, 1 défaite en 3 séries de playoffs) à l’Est, les SuperSonics ont leur première chance de titre depuis le sacre de 1979. Mais Michael Jordan est sans pitié, 28, 29 et 36 points lors des 3 premiers matchs. Les Bulls sont, déjà, sur le point de récupérer leur couronne.
George Karl décide alors de placer Gary Payton sur Michael Jordan:
Le move est osé, mais payant. Payton est une grande gueule, qui ne se laisse intimidé par personne, Jordan compris. Dur sur l’homme, mais plus petit, Gary Payton se place dans le short du numéro 23 et le tient à 23 points (6/19) dans le match 4. Le tandem Kemp (25pts-11rbs) – Payton (21pts-11pds) est lucide en attaque, Hersey Hawkins et Sam Perkins ajoutent respectivement 18 et 17 points, et les Sonics se permettent de mettre une claque aux Bulls (107-86).
Dans la preview du match 5 de NBC, on peut alors lire : « Michael Jordan a fait son pire match dans une finale, en grande partie parce que Gary Payton a défendu sur lui. Malgré cela, Jordan a refusé de donner de la valeur à Payton en déclarant : ‘Personne ne peut m’arrêter. Je suis le seul à pouvoir m’arrêter. J’ai manqué des tirs faciles’. La vérité : Jordan a trouvé le défenseur de l’année énervant. Il le voit comme quelqu’un d’impudent et il aimerait avoir un gros match aux dépens de Payton. »
Bill Walton : « Gary Payton a dominé Michael Jordan »
Le match 5 est remporté par les Sonics (89-78), avec 23 points (7/18), 9 rebonds et 6 assists de Gary Payton contre 26 points (11/22), 4 rebonds et 1 passe décisive pour Michael Jordan. Les Bulls arrachent le titre au match 6, malgré un 5/19 au tir de Jordan et seulement 22 points, son plus faible total dans un match de NBA Finals. Bill Walton, devenu commentateur, déclare alors que « Gary Payton a dominé Michael Jordan dans la deuxième partie de la série. »
Défensivement, les Sonics, Gary Payton en tête, ont fait douter Michael Jordan comme rarement : 5 match sur 6 sous les 30 points; 22 points dans le match 6; les trois plus mauvaises perfs de Jordan en finales (23, 26, 22 aux G4, 5 et 6). Mais ce n’était pas suffisant.
Gary Payton : Nous étions menés 3-0 dans la série, donc je suis aller voir Coach Karl et je lui ai dit : ‘Donne moi une chance de défendre sur Jordan. Qu’avons-nous à perdre?’ J’aurais pu défendre sur Jordan plus tôt dans la série mais j’étais blessé au mollet.
On n’en parlait pas mais j’étais diminué par la blessure. J’ai forcé Jordan à défendre sur moi, pour qu’on se joue en défense et en attaque. Je savais qu’il était frustré que je fasse la couverture de Sports Illustrated avant les finales. Il espérait se venger de SI en me dominant, donc il voulait défendre sur moi et essayer de m’arrêter. Et je scorais. Défendre sur moi lui a mis la pression. Et Jordan n’obtenait pas tous les coups de sifflet. J’avais aussi le respect des arbitres car j’étais All-Star. La stratégie nous a menés jusqu’au match 6.
Gary Payton est alors à l’apogée de sa carrière sportive. Individuellement et collectivement, il brille. Les Sonics font partie des équipes hype en NBA. Ils allient spectacle et victoire, le cocktail idéal pour attirer les fans. Il amène en plus ce supplément de charisme, notamment par son trash talking.
Gary Payton : Je n’ai jamais trouvé ça important… J’essaie juste de parler et de les sortir mentalement du match, pour que leur attention se fixe sur moi. Parfois, j’étais accusé de trash talking alors que je ne disais rien… Les arbitres, les fans pensaient immédiatement que je faisais cela. Mais je pouvais parler à un gars de ce qui allait se passer ou lui poser une question sur sa famille.
À ce stade de sa carrière, Gary Payton est logiquement retenu dans la Dream Team III qui domine les Jeux Olympiques d’Atlanta. Il partage la mène avec John Stockton et Penny Hardaway et brille plutôt par sa régularité. En 8 matchs, il score 5 fois entre 6 et 8 points, sans jamais dépasser ce seuil.
Les Sonics terminent les années 90 dans le haut du panier de la Conférence Ouest. Gary Payton intègre deux fois la All-NBA First Team (1998 et 2000) et signe deux séries de plus de 350 matchs disputés consécutivement (16 janvier 1992 – 13 mars 1996, puis 18 mars 1996 – 17 janvier 2001).
En 1999, Charles Barkley, avec sa démesure habituelle déclare que Payton est le « meilleur joueur au monde. »
Les erreurs des Sonics
Mais la direction fait des erreurs : la signature de Jim McIlvaine pour un contrat en or, le départ de Shawn Kemp, en grande partie à cause de cette signature, et son remplacement par Vin Baker, performant mais moins spectaculaire que le Reign Man. En 1998, après deux échecs en demi-finale de conférence, George Karl quitte son poste pour rejoindre les Bucks. La fin d’une époque à Seattle.
Paul Westphal le remplace mais, malgré un bilan équilibré (25-25), les Sonics manquent les playoffs en 1999 pour la première fois depuis l’arrivée de Payton. Devenu seul leader, Gary Payton monte à 24.2 et 8.9 assists en 1999-2000 mais les Sonics sont éliminés au premier tour des playoffs. Les 2 ans et demi de Westphal à Seattle sont un échec et il est remplacé fin 2000 par Nate McMillan. L’ex-partenaire de Gary Payton ne parvient pas à rendre aux Sonics leur place de contender au sein d’une conférence Ouest toujours plus forte.
Gary Payton est alors dans les discussions du meilleur joueur post-Jordan. The Sporting News écrit en 2000 : « Si on prend l’apport offensif et défensif de manière équitable, est-ce que Gary Payton est le meilleur joueur de l’histoire ? Payton est le meilleur défenseur de tous, et son jeu offensif est meilleur que la majorité. » Le maire de Seattle décrète aussi le 6 juin 2000 comme « Gary Payton Day ». Plus mesuré, George Karl voit en son ex-leader le meilleur meneur de la fin des années 90s.
George Karl : Je ne sais pas qui choisir d’autre comme meneur. Certains disent Jason Kidd. Ok, mais à chaque fois que Gary a affronté Kidd, il a remporté cette matchup.
Toujours impliqué en sélection nationale, il remporte le FIBA Americas Championship de San Juan (1999) puis, en 2000, il décroche une deuxième médaille d’or olympique. Il score 14 points au premier tour contre la Lituanie et 7 en finale contre la France.
Un esprit compétitif mais frustré
Toutefois, ces médailles ne le rassasient pas. Gagneur frustré, Gary Payton obtient alors une étiquette de joueur difficile et égoïste dans le vestiaire. Il prend plusieurs amendes et quelques matchs de suspension de la part des Sonics. Il est aussi, régulièrement, parmi les joueurs qui prennent le plus de fautes techniques.
Il a 34 ans et n’a plus passé un tour de playoffs depuis 5 ans. Les SuperSonics décident alors, à quelques mois du terme de son contrat, de l’échanger aux Bucks principalement contre Ray Allen. Ironiquement, après 999 matchs sous le maillot des Sonics, il joue le 1000e avec les Bucks. Sam Cassell et Gary Payton se voient alors comme les nouveaux Frazier – Monroe. Mais les retrouvailles avec George Karl sont de courte durée : 28 matchs de saison régulière, 19.6 points, 7.4 assists et 3.1 rebonds en moyenne, et une élimination au premier tour des playoffs face aux Nets (4-2).
The Glove ne s’éternise pas dans le Wisconsin. Libre de choisir sa destination, il signe aux Lakers en compagnie de Karl Malone pour décrocher cette bague qui manque tant au palmarès des 2 hommes. Si le Mailman trouve sa place, Gary Payton est plus en difficulté dans l’attaque en triangle de Phil Jackson. Il a notamment moins l’occasion de jouer en post-up. Il est toutefois le seul des 4 fantastiques à jouer les 82 matchs et proposent des stats honorables (14.6ppg-5.5apg).
En playoffs, Gary Payton est totalement marginalisé. Il est fantomatique, perdu et n’apporte plus que 7.8 points à 36.6%. Probablement la tâche noire de sa carrière. Les Lakers échouent en finale, face aux Pistons. Ses détracteurs le surnomment alors ‘la moufle’ en référence, évidemment, au gant qui a si longtemps fait sa réputation.
Finir sur un titre
Avant la saison 2004-05, Gary Payton connait l’humiliation d’un transfert vers des Celtics en reconstruction. Il part avec Rick Fox contre… Chris Mihm, Jumaine Jones et Chucky Atkins. D’abord opposé au trade, il retrouve des couleurs avec Paul Pierce et Ricky Davis. En cours de saison, il est échangé aux Hawks contre Antoine Walker. Rapidement libéré, il décide de revenir à Boston où l’aventure s’achève, encore une fois, au premier tour des playoffs.
Gary Payton met alors le cap sur Miami, où il retrouve Shaquille O’Neal et Antoine Walker. À 37 ans, pour la première fois de carrière, il n’est plus titulaire. Mais dans le sillage du duo Wade – Shaq, le Heat atteint les NBA Finals. S’il est une bonne rotation durant la saison (7.7ppg-3.2apg en 28.5min), il est décisif à 2 reprises lors des finales. Tout d’abord au match 3, alors que les Mavs mènent 2-0, il rentre le tir de la gagne. Puis, lors du match 5, il inscrit le dernier tir, en prolongation, d’une victoire 101-100.
Au terme des finales, il repart pour une dernière saison avec le Heat dans un rôle de vétéran. Shaquille O’Neal est son meilleur avocat, vantant son rôle de leader et de mentor auprès des jeunes. Assagi mais plus vieux, il manque, pour la première fois, plus de 5 matchs en une saison. L’Iron man boucle sa carrière, à 38 ans, à la 8e place du classement des matchs joués et à la 7è des minutes jouées en NBA.
Son numéro 20 n’est pour le moment pas retiré. Le déménagement des Sonics à Oklahoma City a retardé cet hommage. Gary Payton a déjà dit qu’il n’était pas lié à OKC et qu’il ne voulait pas que son numéro soit retiré par le Thunder. En attendant une éventuelle nouvelle franchise à Seattle, il entrera au Hall of Fame en septembre 2013.
Sa fiche
- Né le 23/07/1968 à Oakland, Californie.
- Poste: meneur
- Taille: 1.93m
- Poids: 82kgs
- High School: Skyline HS (Oakland)
- College: Oregon State
- Drafté par les Seattle SuperSonics en 2e position, lors de la draft 90.
Franchises successives
- Seattle SuperSonics (1990-2003)
- Milwaukee Bucks (2003)
- Los Angeles Lakers (2003-04)
- Boston Celtics (2004-05)
- Miami Heat (2005-07)
Palmarès
- Champion NBA (2006)
- NBA Defensive Player of the Year (1996)
- 9x NBA All-Star (1994-98, 2000-03)
- 2x NBA All-NBA First Team (1998, 2000)
- 5x NBA All-NBA Second Team (1995–97, 1999, 2002)
- 2x NBA All-NBA Third Team (1994, 2001)
- 9x NBA All-Defensive First Team (1994-2002)
- NBA All-Rookie Second Team (1991)
- Champion olympique (1996, 2000)
- FIBA Americas Championship (1999)
- Pac-12 Player of the Year (1990)
- Consensus NCAA All-American First Team (1990)
Stats en carrière
- Points: 21 813 soit 16.3 par match.
- Assists: 8 966 soit 6.7 par match.
- Rebonds: 5 269 soit 3.9 par match.
- Steals: 2 445 soit 1.8 par match.
- Matchs: 1 335 (dont 1 233 comme titulaire) de saison régulière, 154 en playoffs.
Documentaire Made in NBA plutôt long, à voir, retraçant la carrière de GP:
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